Série noire

La Crevure enquête (Épisode 2 / fin)


Les disparus de Bavella”. Ou La Crevure finit l'enquête corse...


Un bruit de moteur envahissait la campagne, huit 4x4 déboulèrent ; pas le genre de 4x4 citadin pour femme de médecin qui escalade les trottoirs pour déposer les mômes à l’école, non. Des 4x4 qui grimpent partout. Des hommes armés sortirent et faisaient face aux militaires : ils laissèrent place à deux hommes. Le premier, sûr de lui, s’avança vers celui qui semblait être le chef. Linda commença à filmer avec son portable et fit les présentations.

- Tu vois le premier, c’est Serge Panoli, un parrain corse. Il est officiellement porté disparu depuis trois ans, voire mort. Des collègues ont fait une plaque à son enterrement secret, dans un petit village perdu. On s'est bien fait balader. Et le second, c’est le maire de Bonifacio, élu avec le slogan « transparence et vérité ».

- Regarde-le ton maire, avec sa valise pleine de billets qu’il ouvre avec transparence. C’est bon, c’est validé. Regarde, il récupère les otages.

- Mais pourquoi ils prennent aussi les bidons d’essence ?

- La came est dedans. Regarde le gros chauve, il les vérifie. C’était pas pour foutre le feu, je me suis planté.

- Tu crois que ça va mal finir ?

- Oui. Je pense que les légionnaires vont buter tout le monde et fêter ça en enfilant des chèvres. Cabri, c’est fini, c’était l’animal de mon premier amour...

- Oh, t’es con ! Regarde, ça bouge.


En un éclair le lieu était vide. Le bruit de la forêt reprenait le dessus sur le bruit des véhicules. Nous avons hissé un hamac de toile et fini notre nuit. Le lendemain, Linda trouva un lieu avec suffisamment de réseau pour transférer la vidéo et faire le point avec ses collègues. Les moyens mis en place pour l’opération sauvetage furent détournés pour débusquer Serge Panoli et incarcérer le maire de Bonifacio. La gendarmerie se chargea des légionnaires et de réquisitionner tous les bidons d’essence de la caserne. Les bidons d’essence étaient un moyen de transport idéal pour la drogue : ils circulaient mondialement dans des charters de la légion, sans aucune surveillance. Les Beatles avaient été déposés dans la nuit à l’hôpital. Ils étaient dans un sale état. La suite de l’enquête dévoila que les deux camps se connaissaient partiellement, ils cohabitaient. Les Beatles avaient empiété sur un terrain qui ne leur appartenait pas. Serge Panoli et le maire de Bonifacio avaient sauvé les Beatles, les enfants du pays, mais aussi tenté de récupérer leur marché.


Le préfet a tenu à nous recevoir le soir même dans sa maison privée. Nous y sommes allés avec la Kangoo de police de Linda, pour faire plus officiel. Il y avait tous les lèche-pompes du coin, je reconnus le jeune de la plage, toujours aussi maigre. C’était le fils du préfet. Afin d’être remercié rapidement, je suis allé chercher le Berretta dans la boîte à gant et l’ai rendu au préfet.

- C’est celui de mon père, comment l’avez vous eu ?

- Je l’ai confisqué à votre fils.

- Je compte sur votre discrétion.

- Je compte sur vous pour le faire soigner, d’après ce que j’ai pu voir, il n’est pas le seul.


Nous avons fini la soirée dans une auberge de campagne, le repas était simple et succulent, le digestif de châtaigne maison sonna la fin du repas, et le début du concert d’un groupe local qui mélangeait leurs chansons et des reprises de la Mano Negra. Une soirée endiablée où tout le village était là. Le lendemain soir, Linda m’accompagna au ferry. Il n'y avait pas de chants corses, ni de violons, mais quand le ferry quitta le quai, je compris pourquoi on parlait de l’île de beauté.